Test de Phantom Doctrine

Après Hard West, XCOM like au Far West, CreativeForge Games récidive avec Phantom Doctrine. Cette fois le thème du jeu est l'espionnage, dans un contexte de guerre froide.

Votre mission, si vous l'acceptez

Histoire

Après une création de personnage, très sommaire et dont l’utilité est très relative, le jeu commence par exposer le contexte. Comme chef d'une organisation secrète, nous avons eu des informations sur des machinations secrètes, qui pourraient conduire à un conflit de grande ampleur. Évidemment, notre rôle d'espion est de les déjouer pour éviter que le monde parte en flammes. L'histoire tourne alors sur des enquêtes, récoltes d'informations, libérations d'espions qui en donnent de nouvelles, enquêtes sur tableaux, etc. L'histoire avance de fils en aiguilles. Bref, le côté milieu de l'espionnage et guerre froide et plutôt bien rendu. Les environnements de missions et les bases sont bien dans le thème et ont de bonnes ambiances.

Le problème de ces histoires et qu'on peine un peu à s'y intéresser. Les dialogues des personnages se font en majorité via un visage animé dans une vignette en haut à droite et par quelques messages écrits. Les quelques personnages importants restent assez flous et effacés. Normal pour des espions ? Possible, mais du coup il est difficile de s'y intéresser. De plus, le jeu propose beaucoup d’écrits et un peu de parlote, des trucs pas mal alambiqués, mais pas vraiment de façon fluide et agréable. Là encore, tout le côté espionnage fait que c'est surement logique, mais on peut trouver ça un peu long et chiant en réalité. C'est possiblement un ressenti personnel, mais l'attachement aux personnages, même les soldats et l’intérêt de suivre l'histoire ne sont pas aussi forts que dans un XCOM.

John Doe

Talents

Pour mener les missions à bien l'agence dispose... d'agents ! Ces derniers ont des caractéristiques propres, donc des stats, mais aussi un entraînement et des talents. Pour les talents, ça peut être un bonus de couverture, en rapidité pour découvrir des informations ou encore la faculté de ne pas se faire repérer une fois déguisé ; il y en a un petit nombre. L'entraînement, lui, correspond à ce que le personnage est capable de faire sur le terrain, donc l'utilisation des armes (efficacité et personnalisation) et des compétences à activer (sprint, tir précis, etc). Évidemment, l'agent en question dispose d'une identité et d'une apparence, personnalisables. Cependant, comme dit un peu plus haut, on a du mal à s'attacher à ces personnages, finalement assez lambda, anonymes et interchangeables.

Entrainements

Malheureusement, l’intérêt de tout ça est assez relatif. Beaucoup de talents n'ont pas vraiment d’apport. C'est par exemple le cas de ceux qui donnent un petit boost d'xp durant les missions ou encore de ceux qui augmentent la portée des tirs de vigilance. Pourtant, l'xp c'est utile, direz-vous. Le problème est que gagner des niveaux augmente des stats qui servent surtout pour les combats et donne accès à de nouveaux entraînements, eux aussi seulement utiles pour les affrontements. On en vient au fait que les combats sont assez bancals, diminuant du coup l’intérêt de ces augmentations...

Meurs un autre jour

Deplacements

Dans Phantom Doctrine, les mouvements se font à la manière d'un XCOM. À chaque tour, un personnage possède deux points de déplacements et un point d'action. La plupart des actions consomment uniquement ce point, mais certaines demandent en plus un point de déplacement, comme des tirs rapides de grosse mitraillette. Certaines demandent même deux points de déplacement et pas d'action, comme soulever un personnage par exemple. D'ailleurs, avoir un personnage sur le dos limite les mouvements. À l'inverse, quelques actions, comme ouvrir une porte ne demandent pas de points.

Acuité

À l'inverse d'un XCOM, il n'y a ici pas de système de précision : les tirs touchent forcément un adversaire, sans risque d’échec, sauf s'il effectue une esquive d'acuité. Qu'est ce que c'est ? En fait, chaque personnage possède une barre d'acuité, qui correspond plus ou moins à un effort ou à un réflexe. Effectuer certaines actions, comme assommer un personnage, réduit cette barre. Elle se régénère à un certain rythme dépendant, comme son maximum, des stats du personnage.

Un tir peut être esquivé grâce à cette barre, ce qui consomme évidemment de l'acuité. Le côté aléatoire des tirs vient en revanche du nombre de dégâts reçus. L'ensemble n'est pas très clair, cela dépend apparemment un peu de l'acuité selon le type de tir, possiblement de la distance (ou pas) et la couverture.

Tirs abuse

On en vient à un des gros problèmes du jeu : les ennemis, leur vision et leurs tirs. Les adversaires ont la capacité de réussir des tirs à une distance et avec des lignes de vues assez folles. Comme le montre le screen ci-contre, ils arrivent à faire feu de l'autre côté d'un bâtiment, à travers plusieurs fenêtres, sur un personnage à moitié à couvert derrière un mur. Au-delà même de l'improbabilité de la bonne visibilité de la cible, rappelons que le jeu se passe dans les années 80, avec des gardes en général assez lambda, utilisant des armes assez standards.

Il faut ajouter à cela qu'une fois l'alarme déclenchée, tous les gardes des environs savent très bien où sont chacun des agents. Cela fait que l'ennemi possède souvent l'avantage d'ouvrir le feu sur une cible, puisque ces mécaniques ne fonctionnent pas toujours pour le joueur. Il en ressort que les affrontements armés sont en général peu avantageux pour ce dernier. Dès qu'une alarme retentit, il vaut mieux avoir fini les objectifs de la mission et être proche de la zone d'évacuation. De plus, les ennemis arrivent par 3 ou 4 en renfort après quelques tours. Sachant qu'ils ont encore l'avantage de tir (sauf en trichant, parce que le point de spawn est parfois pas loin), un gunfight qui s'engage est en général une recharge de sauvegarde à faire. Il est curieux d'avoir de si gros problèmes de combats alors que beaucoup de paramètres des agents portent sur les armes à feu. On pourrait penser que c'est logique pour un jeu d'espion, mais en-dehors du point précédent, l'infiltration a aussi des problèmes.

"Infiltrez-vous", qu'ils disaient...

Debut de mission

Si certaines missions ou fuites obligent à engager le combat, la plupart demandent de se faire discret. Voyons comment se déroule en général une mission. Avant chaque départ, il est possible de choisir les membres du groupe ; comme expliqué plus tôt, chaque membre possède ses caractéristiques. En plus de ça, il est possible de prendre des actions de soutien ; plusieurs d'entre elles sont à débloquer au fil du jeu. Ce sont des interventions d'aide, en plus des actions des agents sur le terrain, comme créer un écran de fumée ou sniper un ennemi. L'idée de ces soutien est intéressante, mais peu utile, surtout parce qu'il faut choisir en début de mission depuis quel point cardinal telle action sera faisable. Puis, à l'arrivée sur la carte, il faut choisir l'endroit de départ des agents ; c'est une idée sympathique, qui permet de varier son approche. Les agents sont en civil, sauf ceux qui peuvent se déguiser, au démarrage de la mission.

Zone rouge

Une carte se présente comme ceci. En général, elle contient un extérieur composé de ruelles, parking ou autres et un ou plusieurs bâtiments, ceux-ci composés de deux types de zones. Si les parties extérieures sont plus ou moins tranquilles, nous y reviendrons, l'intérieur des bâtiments est à accès limité. Les zones accessibles au public, comme l’accueil de bureaux ou d'un garage, sont sans trop de dangers, il faut juste éviter les comportements suspects.

En revanche, dans les zones non accessibles au public, délimitées par un encadrement rouge, tout agent vu déclenchera l'alarme. Pour pallier à ces soucis, il est possible d'avoir des agents déguisés. Ceux-ci ne se font pas repérer en zone dangereuse et sont libres de leurs actions. Évidemment, il faut éviter de se faire voir pendant que l'on désactive des caméras, prend des documents ou assomme quelqu'un qui dérange.

Les agents déguisés sont un des aspects principaux du gameplay en mission. C'est en réalité via eux que se fait la majeure partie de l'objectif. En effet, vu qu'il y a des caméras et de nombreux gardes, les déplacements des personnages simplement en civil sont très limités. C'est donc à la première catégorie de partir désactiver les systèmes de sécurités et de se débarrasser de gardes, ou même de civils, aux patrouilles et angles de vue gênants. C'est intéressant de faire se déplacer doucement les personnages déguisés, de désactiver petit-à-petit les sécurités, d'assommer quelques gardes, etc., pour finalement pouvoir atteindre les objectifs en toute discrétion. Pour éviter quelques soucis, le jeu indique le prochain déplacement des personnages non joueur et leur vision.

Alarme

On touche ici aux problèmes principaux de ces infiltrations. La vue des PNJ n'est pas toujours très claire pour les joueurs, en dehors des gardes, pour qui elle est en rouge. Il faut en général passer la souris sur un personnage pour afficher sa vue, ce qui n'est pas forcément ce qu'il y a de plus pratique. C'est encore pire pour les caméras, pour lesquelles il n'y a souvent même pas cet affichage. Second soucis, certains civils neutres peuvent reconnaître vos personnages non déguisés. Le truc est que c'est loin d'être évident en début de mission de savoir qui est un civil dangereux. Pareil pour les personnages déguisés qui, s'ils n'ont pas le talent de comédien, peuvent être ainsi démasqués. Il en résulte des déclenchement d'alarme sur un coup de pas de chance.

C'est là que ça part en n'importe quo : si un personnage se fait découvrir, tous les autres se font découvrir en même temps ! En quoi est-ce qu'un gars lambda qui fume sa clope dans la rue, démasqué par l'ennemi, fait foirer la couverture de la femme déguisée dans le bâtiment ? Et vice-versa ! En outre, les ennemis savent de suite où se situe chacun des agents, même ceux qui sont déguisés. Autant dire que les infiltrations, vu leurs doses d’approximations et d'aléatoire, se font avec un peu de sueur, malheureusement pas vraiment pour de bonnes raisons. Imaginez en plus le jeu en mode IronMan (sans lequel il est possible de faire de multiples recharges, mais est-ce que cela ne tue pas un peu l’intérêt ?), contraignant à recharger des parties de 15 minutes sur des problèmes de game design, plusieurs fois, ce qui agace un peu.

Les problèmes cités au-dessus accentuent le fait qu'il y a une certaine répétitivité des missions. Si les environnement, eux, sont assez variés et plutôt réussis, les objectifs ne le sont pas tant que ça. Et, surtout, la façon de faire les missions est un peu tout le temps la même, surtout au vu des problèmes d'infiltration.

Le QG derrière une laverie ?

Atelier

Tout groupe d'agents secrets se doit d'avoir une base... secrète ! Si vous imaginez quelque chose à la XCOM, c'est un peu ça, mais pas complètement. Déjà, il est assez peu interactif niveau customisation : il n'est question que de faire quelques ajouts de salle (pour débloquer des fonctionnalités supplémentaires) et des agrandissement de celles-ci (par exemple plus de places à l'infirmerie). C'est cependant assez logique au vu du contexte ; ce n'est donc pas un reproche. Par contre, l'utilisation de ces salles se rapproche un peu d'XCOM. Il est en effet possible d'assigner des personnages aux recherches ou à la fabrication, de faire des interrogatoire ou des lavages de cerveaux des ennemis capturés, etc.

Tableau

Nous venons de parler de recherches, parlons aussi des analyses de dossiers et surtout du tableau d'enquêtes. En fait, via les missions, il est possible de récupérer des dossier classifiés et des informations. Si certaines de ces récupérations secondaires donnent accès à des armes ou à des modifications de personnages, voir à des documents que des personnages analysent, elles servent surtout à compléter les études du tableau d'enquêtes. Qu'est-ce que c'est ? Vous voyez les murs remplis de morceaux de journaux et photos dans les films, reliés par tout un tas de fils rouges ? C'est ça ! Qu'ils soient liés au scénario principal ou à des objectifs annexes, il y a plein de dossiers à trous à étudier. Et pour ça, il faut des informations, puis les relier entre elles pour découvrir le mystère ! Lier des document se fait via des mots clés propres à chacun, jusqu'à aboutir à l'information centrale recherchée, au bout de six documents. Ainsi, récupérer ces informations en mission est assez primordial afin que, de manière directe ou via une analyse, elles viennent s'ajouter aux tableaux. Le système est assez sympathique, mais, là encore, il y a une inondation d'informations, qui font qu'on finit par cliquer un peu partout dans la lecture des documents pour trouver les mots clés. De plus, chaque tableau se complétant de façon similaire, c'est vite lassant.

Agence tourisme mondial

Dernier gros morceau du jeu, la carte du monde et ses alertes. Commençons par parler de la jauge de danger en haut à droite. Celle-ci indique l'évolution du risque que la base soit découverte. Lorsque la jauge passe au rouge, cela devient dangereux ; lorsqu'elle est remplie, il faudra changer de base secrète.

Intervention

Qu'est-ce qui fait avancer cette jauge ? Faire de la monnaie via un faussaire (dans le QG) la fait avancer un peu, mais ce sont surtout surtout les opérations ennemies dans les grandes villes du globe qui la font progresser. Des point d’intérêts apparaissent très régulièrement sur la carte, signe qu'il se passe possiblement quelque chose dans une ville. Il faut donc envoyer un ou plusieurs agents pour étudier la question. Parfois, c'est une fausse alerte. Mais souvent, il s'agit d'une opération ennemie, qu'il vaut mieux désamorcer. Il y a plusieurs moyens de faire ça. Si l'opération est découverte assez tôt, il est possible d'y affecter des agents pour la défaire (non jouable). Sinon, il est possible de lancer un assaut, après avoir éventuellement lancé une analyse du terrain (non jouable) par des agents. C'est là qu'intervient tout un aspect gestion des agents à travers le monde. En effet, vu qu'il faut du temps pour aller d'une grande ville à une autre, les agents peuvent ne pas arriver à temps pour certaines interactions. Ce n'est pas forcement un grand problème au début du jeu, mais cela en devient un gros assez rapidement dans la partie. En effet, changer de cachette coûte beaucoup d'argent, refaire les identités des agents aussi. Il faut donc penser à avoir des espions un peu partout dans le monde, bien placés, et aussi à les faire tourner, car ils peuvent se faire découvrir.

Voyages du monde

Les agents peuvent aussi être envoyés pour débusquer des espions ou pour récolter des informations, de manière passive. Là encore, il faut bien placer ses agents, pour avancer les enquêtes ou débloquer des choses, mais en gardant à l'esprit qu'il faut les avoir à disposition pour les interventions. Il est même parfois utile de placer plusieurs agents dans une ville pour ne pas y faire grand chose, mais pour les avoir sous la main en cas d'intervention proche.

Il y a des idées assez intéressantes dans ces systèmes, le problème est qu'une fois encore, les intérêts sont assez flous et que l'ensemble est assez mal expliqué.

Contrat rempli ?

L'espion

Après avoir fait les derniers XCOM, ce Phantom Doctrine semblait un choix judicieux pour passer du bon temps. Or, bien que l'affiliation avec la célèbre licence ne soit finalement pas si grande que ça, le jeu possède ses propres qualités : ambiance bien retranscrite, gameplay relativement propre, idées intéressantes et certaines assez réussies. Le problème est que des aspects sont très nébuleux pour pas grand chose et certains sont mal expliqués. Conséquence logique de son thème, le jeu subit aussi des dialogues et textes nombreux et alambiqués. Il est fort possible que ça plaise aux amateurs du genre et en ce cas la critique est à largement modérer. Cependant, des approximations de design et certains choix assez aberrants, font que le jeu a régulièrement du mal à être agréable. Peut-être aurait-il fallu aller encore plus loin dans l'infiltration ? Assumer jusqu'au bout le côté agent secret et diminuer ce qui touche aux combats, garder seulement quelques échanges de coups de feu à l'arme de poing ? En l'état, hormis pour un fan d'espionnages, complots et guerre froide, le jeu a du mal à vraiment convaincre.

Test réalisé par Zekkangel à partir d'une version fournie par l'éditeur.

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Plateformes Windows
Genres Tactical RPG, espionnage

Sortie 14 août 2018 (Windows)

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